Accueil > Textes > Structures > Local jeunes > Conseils et recommandations pour l’ouverture et l’animation d’un local (...)
Les conseils ci-dessous sont tirés de l’expérience concrète de fonctionnement de locaux de jeunes situés dans trois communes péri-urbaines. Ces conseils et réflexions visent à présenter les questions autour desquelles il est nécessaire de réfléchir et de se positionner. Si notre objectif est d’aider d’autres animateurs chargés d’ouvrir et d’animer un local de jeunes, nous ne concevons pas nos conseils comme des recettes applicables et généralisables partout.
Certains points ne sont pas abordés dans ce document car ils ont fait l’objet d’autres publications (exemple : la question de la sanction en cas de non-respect d’une règle ou d’un interdit).
Une salle polyvalente ou un local réservé aux jeunes ?
Il semble préférable que le local soit réservé aux jeunes afin de signifier qu’une place leur est accordée dans la commune. Pour que les jeunes aient le sentiment que ce local leur est destiné, il peut être intéressant de les impliquer dans sa construction ou son aménagement.
S’il est important de favoriser des rencontres inter générationnelles ou interculturelles pour favoriser la découverte de l’altérité, il ne faut pas oublier non plus que les adolescents ont également besoin de cultiver leur entre soi, de se retrouver entre pairs et d’être à l’abris du regard des adultes.
Le local pour jeunes ne doit pas aussi être confondu avec une structure proposant des activités d’animation ; le local est avant tout un lieu d’accueil et de rencontre de jeunes sur une commune ou un quartier. Pour cela il faut vérifier qu’il existe une volonté politique réelle des élus politiques ou associatifs d’accorder une place aux jeunes dans la commune (par exemple, existe-t-il des créneaux d’utilisation du gymnase réservés aux jeunes en pratique « libre », accompagnée d’animateurs ?). Les jeunes peuvent contribuer à ce qu’une place leur soit reconnue, par exemple en participant et en aidant à des activités communales.
Eviter l’appropriation du local par un même groupe de jeunes
Le local ne doit pas être identifié par les jeunes et les adultes de la commune comme étant le local d’un groupe particulier. Pour cela plusieurs moyens peuvent y aider :
Recadrer et poser des limites quand un jeune ou un groupe de jeunes s’impose ou résiste à l’investissement de nouveaux jeunes ;
Etre ferme sur les conditions d’utilisation du local (politesse, etc.) ;
Favoriser le brassage des jeunes, par exemple, en faisant du local le lieu de rendez-vous pour se répartir dans des activités ;
Faciliter l’accès : quand un jeune « rôde » autour du local, les animateurs doivent aller vers lui pour lui faciliter l’accès ; idem quand un jeune s’y présente pour la première fois ;
Permettre des possibilités d’utilisation variées du local et d’isolement en petits groupes ;
Organiser des activités communes ponctuellement (film, activités sportives, soirée dansante ou musicale, repas commun) ;
Garantir une accessibilité de la structure : des heures d’ouverture adaptées, une fiabilité des animateurs dans l’ouverture du local (les heures et jours d’ouverture doivent donc être adaptés aux disponibilités des jeunes et respectés et garantis par les animateurs).
Aménagement et entretien du local
Présence d’informations :
Le local doit permettre une utilisation multiple (coins jeux, coins discussion, etc.) ;
Le ménage et le rangement doivent être assurés par les jeunes (contrepartie ou obligation liée au fait que c’est le local des jeunes) ;
Le lieu doit être fonctionnel (placard, outil de rangement) et permettre une utilisation souple et multiple ;
Des jeux sont rangés et à disposition des jeunes ; après utilisation ils sont rangés par leurs utilisateurs ;
Des livres et des abonnements à des revues y sont disponibles ;
L’existence d’un budget de fonctionnement au service d’activités d’appel (sortie bowling par exemple) ne nous semble pas un bon moyen ;
Il est important d’expliquer et de rappeler régulièrement les conditions d’acquisition du matériel pour que les jeunes soient garants de celui-ci.
Situation du local dans son environnement
Lorsque cela est possible il est souhaitable que le local :
Ne soit pas isolé des autres structures éducatives, sportives ou culturelles ;
Soit isolé des habitations afin de ne pas gêner les habitants et éviter les conflits de voisinage ; il est de toute manière nécessaire de travailler avec les résidents proches et avec les jeunes sur le bruit (informer les habitants lorsqu’il y a une soirée dansante ou musicale - demander aux jeunes de ne pas faire de bruit à la sortie du local en soirée, etc.) ;
Possède un espace extérieur pouvant servir de parking (vélo, scooter) et pour organiser des animations extérieures en été (barbecue) ; ne pas oublier de prévoir des cendriers extérieurs.
Règlement intérieur
Important de rappeler la loi publique et de l’expliciter ;
Définir un contrat de vie collective basé sur des règles de civilité (respect des personnes, du matériel et des activités) ;
Rappeler les conditions de fonctionnement oralement et régulièrement ;
Rendre explicites et surtout non ambiguës certains interdits (alcool, drogue, violence) ; la position des animateurs ne doit surtout pas apparaître ambiguë ; la consommation d’alcool ou de drogue ne doit être permise ni dedans ni dehors ; quand un jeune arrive dans un état laissant supposer qu’il a consommé trop d’alcool ou de drogue, il est souhaitable de le raccompagner dehors car son état ne garantit pas l’existence d’un comportement sociable ; il existe aussi un enjeu par rapport aux phantasmes ou représentations que peuvent avoir des parents ou des responsables institutionnels par rapport à un local de jeunes : il faut que les règles de fonctionnement et les pratiques des animateurs témoignent d’une rigueur et d’une garantie vis-à-vis de ces interdits ; c’est aussi ce qui peut éviter une stigmatisation du local et garantir son ouverture à tous les jeunes.
Utilisation autonome du local ?
Il ne nous semble pas souhaitable de permettre une utilisation autonome du local par les jeunes sans animateur ou adulte responsable institutionnel pour plusieurs raisons :
Se pose le problème de la responsabilité institutionnelle durant ce moment : les parents connaissent le local comme étant sous la responsabilité de la commune ou d’une association d’animation, il faudrait alors les informer que durant ce moment les jeunes seront en autonomie ; quelle responsabilité civile (problème d’assurance à vérifier) ;
Risque d’être débordé par des demandes de plus en plus nombreuses de groupes de jeunes souhaitant avoir le local en autonomie ; l’objectif de gestion autonome s’oppose à celui de l’accessibilité du local pour tous les jeunes ; d’autres occasions et/ou d’autres espaces doivent être pensés pour permettre la prise de responsabilité par des jeunes ;
Difficulté réelle des jeunes, en terme de capacité à réguler leurs pairs, du fait de leur statut identique : quelle légitimité leur permet de poser des exigences et de porter des interdits vis-à-vis d’autres jeunes ?
Contre pouvoir et/ou prise de responsabilité des jeunes
Il semble intéressant de permettre la mise en place d’une instance composée de jeunes fréquentant le local - collectif de jeunes, conseils de jeunes - afin de reconnaître leur capacité à faire des propositions, être associés à des décisions, prendre des initiatives, conduire des projets, etc. Il doit bien sûr ne pas y avoir de confusion entre les compétences de cette instance et celles de l’institution responsable de la gestion du local jeunes. Cette instance est un espace permettant un entraînement réel à la prise de responsabilité et à l’exercice du pouvoir (et du contre pouvoir) par des jeunes à l’échelle d’une commune ou d’un quartier.
Réunion d’équipe et accompagnement de(s) l’animateur(s)
Lorsqu’un local fonctionne bien, il est fréquent que plusieurs dizaines de jeunes s’y retrouvent les soirées. Il est alors souhaitable (et prudent) de ne pas laisser un animateur gérer seul l’accueil de ces jeunes. Le risque de « débordement » est réel et ne pourra pas être attribué à l’animateur.
Un espace-temps régulier (hebdomadaire) est nécessaire pour :
échanger et analyser les difficultés rencontrées,
harmoniser les attitudes des animateurs,
définir les réponses à apporter face au comportement difficile d’un jeune.
Dans tous les cas il est nécessaire de ne pas laisser isolé(s) un ou des animateurs responsable(s) de la gestion d’un local de jeunes. Il(s) doivent également disposer de suffisamment de temps pour échanger, analyser, définir et préparer leurs interventions pédagogiques.
Ce document a été rédigé par Philippe LEBAILLY, directeur des CEMEA de Midi Pyrénées.