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Réforme des rythmes scolaires et impact sur l’animation

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Les derniers arrêtés sortis en novembre concernant la réglementation jeunesse et sports renforcent les interrogations déjà existantes sur les impacts éducatifs, pédagogiques et organisationnels de la réforme. Il s’agit donc pour les CEMEA de faire un point d’étape et de construire une réflexion collective pour agir au quotidien et poser les bases de changements à venir…

À propos des derniers arrêtés : en novembre 2014, le ministère de la jeunesse et des sports a sorti 5 nouveaux arrêtés. Sans les décrire de manière exhaustive, quatre points nous ont interpellés en premier lieu :

  • Augmentation de la possibilité de faire appel à des titulaires du BAFD pour la direction de centre, qui dépasse les prérogatives (80 jours de direction, pour 80 mineurs) initialement prévues... En 2013, un arrêté l’avait rendu possible pour un an... Nous passons à deux ans, avec possibilité d’aller jusqu’à 3.
  • Les centres de loisirs des mercredis après-midis deviennent des accueils périscolaires... Au-delà d’un aspect politique (on passe de l’extrascolaire au périscolaire avec donc une modification des objectifs éducatifs de ces temps), cela impacte les conditions d’accueil. Effectivement on passe d’un taux d’encadrement de 1 pour 12 pour les + de 6 ans, à 1 pour 18 (et pour les moins de 6 ans on passe de 1 pour 8 à 1 pour 14...) ;
  • Les équivalences BAFA sont modifiées et élargies : le BAPAAT, et le diplôme de moniteur éducateur donnent une équivalence BAFA, ce qui est sommes tout logique... Mais en est-il de même pour le diplôme d’animateur de jeune sapeur-pompier et le diplôme universitaire de musicien intervenant ?
  • Augmentation des capacités d’accueil des centres périscolaires.

Les changements à l’œuvre dans le champ de l’animation sont clairs, il s’agit de faciliter la mise en place de la réforme des rythmes… Pour autant plusieurs éléments nous interpellent, et nous semblent contraires à l’esprit même de la réforme des rythmes. Il ne s’agit en aucun cas pour un mouvement d’éducation de revenir sur l’intérêt premier de la réforme des rythmes (1/2 matinée supplémentaire d’école pour faciliter les apprentissages scolaires).
Toutefois, nous ne pouvons que constater que la mise en œuvre se fait au détriment de certaines ambitions éducatives que l’on aurait pu attendre d’une telle réforme. À ce jour les constats d’insatisfaction sont nombreux.

Notre propos n’est pas de dénoncer en bloc la réforme et de promouvoir un retour en arrière. Au contraire il nous semble qu’il s’agit d’une avancée, et nous pensons que sur certains aspects il faut même aller plus loin. Au regard des situations que nous rencontrons (dans nos formations, dans le cadre des diagnostics et accompagnement que nous produisons, des situations professionnelles vécues par des militant-es de notre réseau), il nous semble important et nécessaire d’interpeller et de poser quelques orientations dans différents espaces.

1. Evolution des effectifs

L’évolution des effectifs, avec dans un premier temps pour les accueils périscolaires de 1 animateur pour 14 enfants de plus de 6 ans (et 1 pour 10 pour les moins de 6 ans), à un taux d’encadrement de 1 pour 18 (et 1 pour 14 pour les moins de 6 ans) pour les communes ayant signé un PEDT. Cette évolution se poursuit aujourd’hui en transformant les centres de loisirs du mercredi en accueil périscolaire - tout du moins pour les communes où les enfants vont à l’école le mercredi matin.
Cette évolution des effectifs a de quoi laisser perplexe ; elle impacte forcément la qualité de la relation éducative que pouvaient construire les animateurs et animatrices avec les enfants. Il convient de rappeler que l’animateur et l’animatrice ont des fonctions polyvalentes : animation pédagogique, prise de repas mais aussi très souvent administratives (suivi des effectifs pour les financements CAF…), rangement… et très souvent avec des âges variés.

Nous proposons une politique enfance jeunesse ambitieuse. Nous proposons effectivement que l’enfance et la jeunesse soient des compétences partagées (entre l’État et les différentes collectivités) avec des obligations de mise en œuvre. Effectivement si nous reconnaissons l’éducation partagée, la place de l’éducation non formelle il convient de s’en donner les moyens. Les centres de loisirs, les temps périscolaires, les séjours de vacances ne peuvent pas être sacrifiés sur le dos de la crise. Ce serait un pari dangereux au regard des impacts éducatifs : ouverture culturelle, vivre ensemble… La hausse des taux d’encadrement est malheureusement un très mauvais signe.

2. L’usage des locaux

L’usage des locaux dans de nombreuses communes est aujourd’hui réellement problématique et ce à plusieurs niveaux :

  • Il existe actuellement une augmentation des effectifs sur les accueils périscolaires ; avec des locaux qui ne suivent pas cette évolution. Les enfants sont trop souvent accueillis dans des locaux non adaptés : des halls, des salles polyvalentes sans aménagements permanents, des cours, des salles de motricité (sans droit d’usage des structures de motricité)…
  • Le partage des locaux avec les équipes enseignantes est souvent source de tension. L’usage n’est pas réfléchi comme un espace partagé et souvent géré quasi-exclusivement par l’équipe enseignante. De même dans beaucoup d’écoles, les animateurs/trices doivent s’adapter au règlement construit par l’équipe enseignante. Cela se fait en dehors et en contradiction avec les différentes chartes départementales élaborées à cet effet.

Nous proposons que les locaux soient la traduction d’un projet éducatif local ou un PEDT partagé.
Nous proposons que dans chaque commune des chartes d’usages des locaux soient adoptées avec une égalité entre les différentes équipes. À terme il est nécessaire de réfléchir à construire des nouveaux bâtiments, des Maisons de l’enfance aux abords des écoles avec des espaces spécifiques et partagés.
La réforme aurait pu/dû être un formidable outil pour impulser un travail de concertation éducative. Il convient de repenser l’école comme un lieu de vie de l’enfant, qui répond à plusieurs temps éducatifs ; cela nécessite de penser l’aménagement mais aussi le travail interdisciplinaire entre équipe enseignante et équipe d’animation, pour construire un projet commun pour un lieu partagé.

3. Le morcellement des temps d’animation

On assiste à un morcellement des temps d’animation, finie la journée complète du mercredi… mise en place de temps d’animation (TAP) allant entre 20 minutes et 3/4 heures pour la majorité des accueils. Souvent découpés entre un temps lors de la pause méridienne, un autre à l’issue de l’après-midi. Quels projets d’animations construire et défendre sur des temps aussi courts ? Ces conditions entraînent également une précarisation des conditions de travail, avec de fait, une difficulté à constituer des équipes d’animation stables avec un projet pédagogique ambitieux. Si l’objectif premier est de prendre 1/2 matinée pour les apprentissages scolaires il serait intéressant de libérer des temps plus longs (des après-midis !) pour un réel temps libre et éducatif.

Nous proposons une évolution des temps et horaires des temps péri et extra-scolaires
Privilégier des TAP (ou temps péri-éducatifs) de 1h30 comme la loi le permet au lieu d’avoir des temps de 20 ou 30 minutes… Cela permet à la fois la construction de projets d’animation cohérents, mais aussi d’améliorer l’organisation du temps de travail des équipes d’animation et donc de permettre la mise en place d’équipes d’animation qui peuvent construire et structurer un projet pédagogique. Dans des perspectives de nouvelles réformes, nous devons rechercher à libérer certains après-midis pour encore mieux inscrire un projet éducatif centré sur un équilibre entre l’éducation formelle et non formelle. Cela nécessitera un ré-équilibrage du budget de l’État entre l’éducation formelle et non formelle.
Ré-affirmons que si, pour des raisons juridiques, d’inscriptions dans des politiques d’États, les noms de ces différents peuvent varier, cela ne remet en rien en cause les valeurs éducatives communes qu’on peut y trouver, et les similitudes dans les mises en œuvre de projet.

4. Un PEDT trop souvent scolaro-centré et centré sur l’organisationnel

Concernant la mise en place ces PEDT, on peut observer (souvent avec le prétexte de l’urgence et de l’opérationnalité) que plusieurs communes appauvrissent le sens de ces projets :

  • On se centre sur la question de l’organisation et des moyens sans toujours poser la question du sens ;
  • On se centre trop souvent sur l’école, le périscolaire, en oubliant l’ensemble des acteurs éducatifs : centres de loisirs, de vacances, associations sportives et culturelles, parents… La co-éducation, l’idée d’une éducation partagée est trop souvent oubliée.

Nous proposons de construire des projets éducatifs centrés sur l’intérêt de l’enfant et prenant en compte l’ensemble des acteurs qui l’entourent – sans hiérarchie et avec la reconnaissance des spécificités et complémentarités de tous et toutes. Construire des PEDT qui ne se contentent pas de gérer les temps des enfants, et des familles, mais qui soient un réel levier pour la construction d’un projet éducatif global, qui intègre les temps scolaires, le périscolaire, l’extrascolaire (en accueils de loisirs, en mini-camps, en centre de vacances etc...)

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