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La non mixité au centre de loisirs de Malakoff (Nantes)...
L’expérience de la non mixité dans certains espaces et temps s’est vécu au centre de loisirs dans le quartier de Malakoff, à Nantes, sur le groupe des 9-12 ans qui accueillait environ 30 enfants.
Face à des conflits de jalousie entre les filles et des sorties conflictuelles avec les garçons, les filles ont demandé lors d’un conseil d’enfants en janvier 2003 d’effectuer une sortie cinéma entre elles. Le mercredi suivant se vivait alors la sortie cinéma, où certaine filles apprirent à se connaître en échangeant et par le biais de joyeuses rigolades.
Pendant ce mois-ci, les conseils d’enfants atteignaient difficilement leur objectifs pour diverses raisons : chahuts et monopole de la parole par les garçons, nombre élevé d’enfants, nouveaux arrivants. Face à cela, certaines filles lassées du comportement de certains garçons émettèrent l’idée de diviser le groupe en non mixité pendant la première partie du conseil, puis de revenir en mixité pour mettre en commun leurs propositions, interrogations, projets, critiques. La proposition fut adoptée.
Cette structuration du conseil s’est alors progressivement installée, c’est alors que sont apparus des projets du côté des filles qui demandaient de la préparation et de l’investissement. Les garçons, au début enjoués par certains projets, ne se mobilisaient pas sur ces derniers. Petit à petit les garçons n’étant pas force de proposition et se laissant porter par ce que nous pouvions leur proposer (animateurs-trices ou groupe de filles), les filles décidèrent d’effectuer certains projets en non mixité (sorties, repas, activités, biwouaks puis projet à la mer). Les garçons à la vu de la concrétisation de certains projets des filles et des relations qui naissaient entre certaine, décidèrent de vivre aussi des projets en non mixité à côté de ceux en mixité.
En janvier 2004, le bilan de ces espaces en non mixité était plutôt positif aussi bien dans ce qui pouvait se vivre en non mixité que du renouveau de ce qui ce vivait en mixité. Mais aussi dans la rencontre avec les personnes à travers ce qu’elles désiraient, vivaient.
Les filles étaient moins dans un rapport de compétition entre elles car les représentations qu’elles avaient sur les autres du groupe (surtout celles plus à l’écart en mixité) s’étaient amoindris par le fait des échanges et du vécu ensemble. Le fait d’avoir oser certaines activités dites « masculines », entre elles, les mettaient en confiance pour les vivre dans l’espace en mixité avec les garçons. Les garçons, eux aussi, avaient pu apprendre à mieux se connaître loin des enjeux de séduction et du rapport de force qui les identifiaient comme hommes dans le quartier. Ils posèrent plus facilement des questions sur la sexualité souvent liées pour eux à des représentations sociales de l’homme : virile, fort, ne montrant pas ses sentiments et s’autorisèrent des activités, jeux, échanges souvent identifiés comme féminin (perles, bracelets, activités manuelles, cordes à sauter, échanges sur leurs relations amoureuses et la souffrance que cela pouvait engendrer, etc.).
Ces deux espaces non mixtes ont permis de faire évoluer les représentations, d’enrichir et d’agrandir pour chacun et chacune le champs (ouvert) des possibles de faire, de penser et de vivre. L’objectif était bien de permettre à chacun et chacune de trouver et d’avoir le choix dans ce qui faisait sens pour lui et elle, non par les représentations, mais bien dans ce la personne avait envie de vivre. L’espace en mixité était alors plus serein, non exempt de rapport de domination et de pouvoir, mais amoindri de ces derniers tout au moins.