Accueil > Textes > Vie quotidienne > Accueil > L’accueil au centre de loisirs
L’écart est à première vu immense entre ce que recouvre la notion d’accueil et ce qui se vit aujourd’hui dans la grande majorité des centres de loisirs sans hébergement. Immense, et pourtant à certains égards infime : l’accueil organisé par l’équipe d’animation et n’ayant pour finalité que l’inscription des enfants à la journée reste l’accueil.
Immense, cependant, car cette nécessité administrative occulte l’importance de ce temps de transition pour l’enfant : elle ne lui offre pas la possibilité de se réapproprier les lieux, de renouer des relations avec les autres et avec les animateurs, de refaire connaissance avec le mode de vie du centre ; elle compromet son intégration et par là-même son association au fonctionnement du centre et à ses activités ; elle occulte aussi le fait que la journée au CLSH est un temps de loisir et que l’enfant doit se voir offrir dès son arrivée des activités adaptées qu’il choisira librement en fonction de ses goûts et de ses aspirations à se détendre et à se divertir.
Immense, enfin, car cette nécessité administrative reflet du fonctionnement du centre conforte un image caricaturale et hélas très largement admise : celle d’un CLSH n’ayant pour seule vocation que la garde des enfants et leur nécessaire surveillance.
Les enfants accueillis régulièrement au centre de loisirs sont habitués à vivre des ruptures dans leur mode de vie : séparations, changements de lieux, de rythmes (crèche, école...) ; le CLSH en sa forme actuelle et plus particulièrement la phase d’arrivée en fait partie. Pour que ce moment important soit vécu positivement, l’équipe d’animation doit faciliter cette transition puis favoriser la réadaptation au fonctionnement du centre, au lieu, aux personnes ; la phase d’inscription qui suit généralement l’arrivée au centre, outre son aspect strictement administratif (recensement des présents, commande des repas, encaissement de participation) est donc essentielle pour que s’opère le passage entre le CLSH et le milieu familial.
L’animateur chargé de cette tâche est la première personne avec qui l’enfant et parfois la famille sont en contact ; c’est à lui d’aider l’enfant à entrer dans la structure en l’informant sur le déroulement de la journée, sur les enfants déjà arrivés, sur ceux qui viendront ou qui ne viendront pas.
Mais pour prendre toute la mesure (et surtout pour les jeunes enfants et les nouveaux arrivants), cette phase de transition doit s’opérer avec la coopération des parents. L’animateur pourra leur donner des informations sur le déroulement de la journée, sur l’organisation du centre et de la vie quotidienne pour les rassurer, pour qu’ils puissent à leur tour rassurer leur enfant.
Coopérer avec les familles c’est aussi se donner les moyens de mieux connaître l’enfant : ses malheurs de la nuit précédente, un évènement familial important, une impossibilité d’activité d’ordre médial... et donc d’améliorer la qualité du travail d’animation, la qualité relationnelle et la qualité de l’écoute à établir entre les encadrants et les enfants.
La transition entre vie familiale et CLSH s’opérera d’autant mieux que l’on aura pris le soin d’installer le lieu d’inscription à proximité du lieu de vie du groupe, ou, mieux, du lieu familial ; laisser aux parents la possibilité d’accompagner leur enfant jusque dans le lieu d’accueil facilitera ainsi la prochaine séparation et leur permettra de se faire une image du CLSH plus conforme à ce que souhaite l’équipe d’animation.
Mais l’accueil ne se résume pas en une inscription et en une phase de transition.
En effet, c’est aussi pour l’enfant se détendre (vivre à son rythme), se divertir (être actif - jouer - être en relation), et par là-même se réapproprier les lieux, les personnes et les règles de vie...
Nous savons combien diffère d’un enfant à l’autre la manière dont commence sa journée : certains éprouvent encore le besoin de se reposer, d’autres au contraire courent et jouent dès leur arrivée. Nous savons aussi combien diffère, selon chaque enfant, la durée de ses actions.
C’est à cette situation de fait que sont confrontés les animateurs. Et sans étendre respecter totalement les rythmes de chaque enfant (ne serait-ce que parce qu’hélas leur temps nécessaire de sommeil n’est pas plus respecté que les autres jours de la semaine), donner à chacun la possibilité de commencer sa journée de CLSH à un rythme qui soit le plus proche de son rythme personnel est un objectif essentiel. Pour y parvenir il est nécessaire d’avoir prévu une organisation de l’espace qui permette de gérer la coexistence d’enfants qui se reposent et d’autres plus actifs ; rythmes contradictoires lorsqu’ils s’expriment en collectivité et dans un même espace.
Il convient d’agencer l’espace du centre de loisirs en différents espaces ou « coins d’activités », les uns ayant une destination calme pour les enfants désireux de se reposer encore (lecture, jeux, et aussi coussins, et pourquoi pas matelas...), les autres une destination plus active adaptés aux enfants mieux éveillés (espaces extérieurs aménagés le plus souvent).
Enfin, comme il est fréquent que les enfants qui arrivent au CLSH n’aient que peu ou pas déjeuné avant de venir, un espace peut être aménagé pour qu’ils puissent prendre une collation. Les enfants se répartissent alors selon leurs propres besoins et leurs propres rythmes dans les différents espaces d’activités et peuvent, toujours à leur rythme, passer d’une activité plus calme à une activité plus vive.
Par un aménagement riche et varié de l’espace nous favorisons donc le respect des rythmes individuels, mais nous offrons aussi la possibilité d’être actif dès l’arrivée au centre.
Les lieux du jeu ainsi agencés permettent à l’enfant d’y accéder de façon autonome, d’être ainsi libre du choix de son activité et de ce qu’il y prendra (insistons au passage sur le libre choix et l’autonomie en opposition à l’activisme forcené où tout le monde doit en permanence être en activité, où tout le monde doit le plus possible produire des chefs-d’œuvre divers qui finiront régulièrement à la poubelle).
Enfin, l’existence d’espaces clairement délimités dans le centre et bien investis par les enfants morcelle le grand groupe en autant de petits groupes où les relations entre enfants peuvent s’organiser à la mesure de leur champ et de leurs possibilités de socialisation.
Chacun trouvera dans le petit groupe la possibilité d’établir ou de rétablir des relations affectives, de se réapproprier les lieux de manière progressive et de se re-familiariser avec le fonctionnement du centre.
Pourtant, l’aménagement du CLSH ne suffit pas à lui seul à assurer la pérennité des objectifs que l’équipe d’animation peut lui assigner. Seule une présence active des animateurs qui n’ont pas en charge l’inscription au moment de l’accueil permet d’assurer cette pérennité (l’arrivée échelonnée des adultes dans de petites équipes compromet malheureusement souvent la gestion du temps d’accueil).
L’équipe d’animation, garante du respect des rythmes individuels, du bon fonctionnement des espaces et des activités, de la « qualité » des relations entre les enfants..., doit veiller d’abord au respect des règles de vie par les enfants : les enfants actifs ne doivent pas déranger les enfants qui se reposent, les espaces calmes ne doivent pas être dévoyés par un trop grand nombre d’enfants, les espaces utilisés doivent être rangés après y avoir joué...
Mais un accueil de qualité ne saurait se résumer en un quelconque procédé et en sa gestion, aussi efficace soit-il... La qualité de l’accueil au centre de loisirs (tant au moment de l’inscription qu’après) dépend en premier lieu de la relation qu’entretiennent les animateurs avec chaque enfant.
S’il n’est pas toujours possible d’entrer en relation de manière « profonde » et significative avec chacun des enfants qui arrivent au moment de l’inscription, la mise en place d’un temps d’accueil relativement long permet de palier cette difficulté. L’éclatement du grand groupe en petits groupes d’enfants permet donc aux animateurs d’entretenir plus facilement des relations individualisées avec les enfants : occasion de poursuivre l’échange entrepris lors de l’inscription, occasion d’informer chaque enfant des activités, des projets de la journée, de l’y intéresser mais aussi d’être à l’écoute des envies, des attentes de chacun. Autant d’éléments qui par leur coordination permettront sans doute, et plus sûrement que par le biais d’une réunion d’enfants, aux animateurs de proposer des activités adaptées et aux enfants d’y trouver un intérêt, un plaisir, une source d’épanouissement.
Entretenir, dès l’accueil, une relation avec chaque enfant, c’est lui permettre de vivre mieux sa journée puisqu’il évoluera dans un climat de confiance et de sécurité, gage de réussite de ses projets et de ses inter-relations.
Claire VALENTIN, Olivier CANY, Goupe CLSH CEMEA Paris.
Dossier des Cahiers de l’animation n°1 : Les centres de loisirs.
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