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La réalité des pratiques d’animation, dans le domaine des CVL obscurcit la compréhension des terrains d’application du Bafa.
Le tout nouveau brevet professionnel : arrêté du 2 septembre permettra-t-il d’y voir plus clair ? En revenant à l’essence même de ce diplôme, certains arguent que son appellation : Brevet d’aptitude, diminue de fait sa portée... Argutie !
Le Bafa a été créé, dans la suite du diplôme de moniteur de colonie de vacances (bien plus explicite dans sa terminologie) pour répondre aux besoins d’encadrement des centres de vacances et de loisirs. Il a été créé dans une philosophie explicite de volontariat, hors de toute ambition professionnelle. La formation qui conduit à son obtention répond à cet objectif. Il s’agit bien d’armer suffisamment des jeunes gens qui vont prendre en charge des enfants sur leur temps de vacances, et exclusivement sur leur temps de vacances. Il s’agit de donner les bases nécessaires à de « vieux » adolescents pour qu’ils assurent en toute sécurité, physique et morale, la vie quotidienne et les activités d’enfants et de jeunes sur leurs temps de loisirs à savoir un temps non contraint, celui de faire ce que l’on veut quand on le veut (voir Joffre Dumazedier) et non celui des contraintes sociales dans lequel on pourrait facilement placer les temps de restauration scolaire et ces fameux temps d’aide aux devoirs qui semblent bien loin d’un temps non contraint ! Cette formation en alternance, place d’office chacun des protagonistes de l’action dans un rôle formateur. Le formé d’un jour (ou plus précisément de vingt-huit jours) devient le formateur de son nouveau collègue. Et cette dialectique de formation fait partie intégrante de la philosophie du Bafa ; elle inscrit précisément la formation dans une formation de la personne et du citoyen, autant que dans une formation à une ou des techniques. Mais alors, où le bât blesse-t-il ? Dans le simple fait que, par un glissement qu’il nous appartient de dénoncer, sans le juger, on ait confondu les terrains de pratiques ! Et que certains employeurs exigent, ou plutôt n’exigent que le Bafa pour encadrer certaines activités concernant des enfants ! Garderies scolaires, restauration scolaires, aides aux devoirs, animations quotidiennes...
Le Bafa, ou du moins la formation qui s’y rattache, a besoin d’être réactualisé. Mais cette réactualisation devra éviter tout rapprochement avec les formations à l’animation professionnelle. Si la durée de formation du Bafa ne suffit pas, c’est du côté des stages pratiques qu’il faut regarder, tant il nous semble que c’est sur le terrain que s’acquièrent les principales compétences. Et il sera nécessaire de lui garder cet aspect vacances, cet aspect loisir, cet aspect ponctuel dans l’action.
Une formation pour les temps contraints
C’est bien parce que les animateurs qui encadrent les centres de vacances et de loisirs le font de façon ponctuelle qu’ils peuvent y mettre tant d’énergie et d’enthousiasme. Nous ne faisons pas ici le procès des professionnels dont nous ne doutons pas un instant de l’enthousiasme et de l’implication, mais dont nous connaissons aussi les difficultés auxquelles la quotidienneté de l’action les confrontent. La formation est une formation spécialisée. Elle met en œuvre tous les partenaires. Les animateurs dits Bafa ont croisé dans leur formation des directeurs, des organisateurs, souvent des parents. Mais ils n’ont pas croisé des instituteurs, des professeurs, ou des éducateurs spécialisés, voire des personnels de justice.
Au-delà de la simple non application de la convention collective de l’Animation, qui délimite très précisément les temps sur lesquels des animateurs volontaires peuvent être employés (exclusivement les temps de vacances scolaires), c’est sur le terrain de l’intérêt des enfants que nous nous plaçons pour dire qu’il faut laisser à chacun la place qui lui revient. Il est évident, et le terme est faible, que les temps de restauration scolaire n’ont rien à voir avec les temps de restauration collective en vacances. Les enfants savent très bien qu’ils ne sont pas en vacances. Ce temps devrait être inscrit dans les projets d’école concertés avec les enseignants. Cela nécessite une formation particulière.
Personne ne peut croire qu’il ne s’agit que de « garder » les enfants ! Il semble en revanche quasiment ridicule d’exiger des personnels de cantines, qui ne feront jamais de centres de vacances et de loisirs, de suivre une formation Bafa, quand leurs besoins en formation se situent à un tout autre niveau. Il est encore plus évident que les temps d’aide aux devoirs, encadrés par des animateurs Bafa, ne peuvent qu’accroître le trouble des enfants. D’abord parce qu’il nous semble que les devoirs et tout ce qui s’y rapporte concernent les enseignants. Et que si aide aux devoirs il doit y avoir (nous pensons pour notre part que d’autres activités, plus ludiques, aideraient tout autant les enfants à comprendre leur environnement et les autres, et donc par rebond les aideraient à l’école), elle doit être organisée en concertation avec l’école et les enseignants. Il est dangereux de laisser croire à des enfants que l’animateur avec lequel ils jouent le mercredi, qui est si compétent dès lors qu’il s’agit des activités de loisirs, soit « meilleur » que son instituteur, parce qu’il est du quartier, et que lui au moins, il le comprend ! Quant aux animations quotidiennes, elles ne peuvent qu’être du fait d’un projet pédagogique à long terme, dans une durée réfléchie, dans un cadre social déterminé, toutes choses nécessitant là encore une formation particulière.
Tout ce qui précède ne remet en rien en cause les compétences des animateurs Bafa. Ou alors il nous faudrait dire que bien des animateurs Bafa, avec des années d’expérience, sont bien plus compétents que ce tout jeune diplômé Beatep, voire Defa, qui n’a qu’une toute petite expérience de terrain.
Alain Gheno