Accueil > Economat/alimentation > On n’aime pas ce qu’on mange ! C’est toujours des légumes !
« Ouais ! j’aime pas c’qu’on mange, c’est toujours des légumes... on pourrait pas mettre... » Déclaration répétée de quelques jeunes d’un groupe de 11-13 ans qui ne voulaient pas de légumes mais plutôt des pâtes, qui voulaient rester mince mais qui échangeaient leur viande contre la semoule au caramel.
De cette déclaration est née l’idée que l’économat ne devait pas se faire sans les jeunes, pas tout, mais au moins le passage du plan alimentaire aux menus. Sitôt pensé, sitôt mis en place.
Le bureau de l’économe, une simple table de classe, a été installé dans une pièce de passage, à des heures convenues avec l’équipe : la table, une grande feuille de papier avec des cases, des rectangles de couleur symbolisant la structure des plats, quelques livres de recettes, une envie de bien manger... Les ingrédients de menus réussis étaient réunis, le nouveau coin d’activité pouvait vivre.
Bien manger c’est quoi ? Pour les jeunes trouver des plats que l’on aime, que l’on connaît déjà... Pas de risques inutiles !
Une chance pour le groupe : des jeunes de cultures différentes. On ne connaît pas tous les mêmes choses, on peut faire goûter à tous le ragoût de Leïla et le gratin de courgettes farcies de Julien... C’est un peu risqué car on aimerait bien que les copains apprécient le plat qu’on aime.
La discussion s’engage, l’économe écoute mais tient bon sur des incontournables posés qu’elle justifie : deux crudités (vite résolu), un plat de légumes chaque jour (moins apprécié), du fromage, des laitages... Voir la cuisinière, prendre son avis (facile ! elle était d’accord pour discuter, avait des propositions), goûter des recettes du pays (moins facile que je ne le pensais, peut-être parce que complètement étrangère au groupe).
Ce travail, cette activité a intéressé les jeunes : participer à l’élaboration de menus, comprendre pourquoi tel aliment est intéressant, pourquoi il ne faut pas manger trop de sucre, mais aussi être supporter au moment des repas de ce que l’on a proposé : ce n’est pas évident d’entendre les copains dire que mon plat préféré à la maison n’est vraiment pas bon, tout cela a été une aventure pour quelques jeunes. Au début quatre d’entre eux ont été intéressés, puis, la deuxième semaine, sept.
Dans ce groupe de sept, certains qui partaient en camping on été moteurs des choix de leur groupe en matière d’équilibre alimentaire. Une partie seulement des menus a été élaboré avec les jeunes ; avec les discussions ça prenait du temps, l’économe et la cuisinière ont complété. Une règle : les plats proposés par les jeunes auraient toujours une présentation alléchante, soignée (accord de la cuisinière).
Résultat : une volonté de goûter, pas toujours manger, un autre regard sur l’alimentation, une entrée facilitée dans la présentation des mini-camps.
Nous l’avons fait trois semaines dans un centre de 28 jours, les plus intéressés ont été les 12-13 ans. Certains sont venus au marché de gros, tôt le matin, et ont découvert un monde insoupçonné de légumes et de fruits.
Cette association des jeunes s’est renouvelée avec plaisir dans d’autres centres. Nous avons réussi à passer du « je râle » au « je discute, je suis entendu » dans un domaine qui touche autant l’affectif que l’alimentation.
Sylvie Baroo, Les Cahiers de l’Animation n°36