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Les jeux de fiction sont les jeux où l’enfant, les enfants, jouent un personnage, une situation, une histoire qu’ils inventent en jouant.
Ces jeux sont importants chez le jeune enfant (mais aussi chez l’enfant de 6 à 10 ans), car ils lui permettent de reproduire des situations qu’il a vécues, peut-être difficilement, et ainsi de mieux les saisir, de mieux les comprendre (la visite chez le médecin) ; de se mettre à la place d’une autre personne, de s’identifier à elle (la maman qui gronde le bébé mais cela peut-être aussi un personnage imaginaire, comme une sorcière...) ; d’extérioriser ce qui est en lui, de libérer certaines pulsions, comme l’agressivité (il ne peut pas taper son copain, car c’est interdit mais il peut donner une fessée à son ours ou faire semblant de se battre avec ses copains) ; de développer son imaginaire et sa créativité, car dans le jeu tout est permis ; on peut essayer, faire des choses impossibles dans la réalité, sans la peur de se tromper. Les seules contraintes sont celles que se donne l’enfant (ou se donnent les enfants qui jouent ensemble).
Les enfants n’ont pas besoin des adultes pour y jouer. Cependant, leurs attitudes, la préparation et l’organisation du centre va favoriser ces jeux de fictions.
Un premier facteur va être déterminant : c’est celui de laisser à l’enfant le temps de jouer. Le jeu ne peut se programmer. Il ne peut y avoir une heure pour jouer et une heure pour faire autre chose, une activité décidée par l’adulte. Il est absurde de vouloir arrêter le jeu des enfants pour leur proposer, voire leur imposer, une autre activité. C’est à l’enfant, et à lui seul de décider quand et combien de temps il veut jouer. L’organisation générale du centre va également influencer les jeux des enfants. Il est difficile pour un enfant de jouer s’il a été réveillé alors qu’il avait encore sommeil ou s’il ne se sent pas en sécurité dans le centre. Par contre, il a pu se créer ses repères nécessaires s’il sait que son animateur est disponible (sans être forcément toujours derrière lui), alors, il pourra se consacrer entièrement à son jeu. C’est par l’aménagement de l’espace que l’animateur va pouvoir favoriser les jeux de fictions. Il est difficile pour un enfant de se créer un monde dans une pièce vide. Aussi, le centre de vacances maternelle doit être aménagé en différents coins de jeux, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.
On pourrait multiplier les exemples : un village en gros carton, une cabane, un tipi, un « coin docteur », un salon de coiffure...
Si certains aménagements sont mis en place avant l’arrivée des enfants, d’autres sont construits pendant le séjour. L’observation des jeux des enfants doit donner des idées à l’équipe d’animateurs. Il n’est pas nécessaire de décorer ces coins de jeux, les enfants peuvent le faire eux-mêmes. On évitera ainsi de trop marquer ces espaces avec notre vision d’adulte. Par contre, il est important de prévoir dès l’installation le rangement du coin : panoplies, caisses, étagères... Il faut que l’enfant puisse facilement ranger seul lorsqu’il a terminé de jouer. Le rangement doit d’ailleurs être une règle clairement expliquée aux enfants en début de séjour. Un aménagement mis en place en début de séjour doit avoir la possibilité d’évoluer au fur et à mesure que les enfants se l’approprient. Les jouets que les enfants ont construits (un cheval chaussette, une voiture en carton... [1] y trouveront naturellement leur place et viendront enrichir leurs jeux.
On entend souvent des adultes regretter que les enfants passent leur temps à jouer à Batman ou au dernier héros de dessins animés. C’est oublier que ces personnages font partie de leur culture. Il est cependant possible de leur ouvrir de nouveaux horizons en leur lisant des livres, en leur racontant des histoires... J’ai souvenir d’enfants jouant aux « Maximonstres » après la lecture de Max et les Maximonstres ou rejouant Jean sans peur, un conte qu’ils avaient particulièrement apprécié. Ce sont toutes les activités du centre qui viendront enrichir les jeux des enfants : une balade en forêt, des jeux avec les éléments naturels, la cabane construite par les enfants, des jeux chantés... Enfin, méfions-nous de ne pas dénaturer ces jeux spontanés si riches pour en faire des saynètes ou des pièces de théâtre jouées par des jeunes enfants. Jouer devant les autres, théâtraliser, ne correspond pas aux besoins des enfants de cet âge. Alors, laissons-les jouer.
Olivier Epron, Cahiers de l’Animation n°27, CEMEA, 3ème trimestre 1999.
[1] Voir par exemple les fichiers Jeux et jouets à construire des CEMEA