Accueil > Textes > Structures > Centre de loisirs > Querelle de forme ou question de fond ?
Pourquoi faut-il que les centres de loisirs copient le fonctionnement de l’école pour être éducatifs ? Suivant les traces du projet d’école certains se dotent d’un thème pour l’année, pour le mois, la semaine, quand ce n’est pas le même thème qui revient tous les mercredis. Le centre de loisirs peut affirmer sa complémentarité d’abord par la place du jeu et du libre choix. Un centre de loisirs à thème, c’est plus éducatif nous dit-on parce que ça mobilise tout le monde autour d’un même thème projet/sujet et toutes les possibilités offertes par un sujet se trouvent ainsi investies et exploitées plus en profondeur.
Les animateurs peuvent trouver dans ce type de fonctionnement un cadre plus facile pour travailler et l’avantage d’avoir des repères stables et un cheminement tout tracé. Mais quel intérêt ? Ce n’est pas la conception de l’animation que nous défendons.
Les enfants non soumis aux mêmes contraintes qu’à l’école sont capables de construire aux-mêmes leur propre fil conducteur pour vivre et décider de leurs loisirs. Pourquoi faut-il à tout prix leur en imposer un ? C’est certainement plus facile d’expliquer aux familles à quoi sert le centre de loisirs à thèmes et ce que les enfants y font de leur temps. Car un CL à thème a l’objectif d’être très intéressant et même instructif.
Mais quand est-ce qu’on joue ? Un CL avec un thème, si possible bien élaboré, mobilisateur, donne tout de suite une image rassurante du centre, une visibilité meilleure de ce qui s’y fait. Dire que les enfants jouent, ça fait pas sérieux et ce n’est pas suffisant comme occupation ; pas assez éducatif, à moins de jouer à apprendre en jouant ?
Pourquoi faut-il qu’il soit à tout prix une école bis ? Qu’il essaie d’abord d’être lui-même et de porter son nom. Être le centre de loisirs des enfants ? À chacun son métier et à chaque lieu d’accueil des enfants sa fonction ! Au CL il n’y a pas d’obligation de production.
Un enfant ou un petit groupe qui décidera, parce que l’un d’entre-eux en a eu l’idée, ou bien même l’a entendu de la bouche d’un adulte, de faire telle activité, de se lancer dans telle autre, par exemple, au hasard, les Indiens, s’engage sur son choix et cette démarche revêt un tout autre sens.
Cette proposition non prévu à l’avance, les enfants la définissent et la négocient. Ils ont envie de jouer aux indiens, et pour cela ils veulent construire un tipi pour y dormir. Puis ils voudront se grimer. C’est le début d’une histoire avec peut-être un repas trappeur ou un jeu de pistes un autre jour avec messages et codes secrets, danses et champs guerriers...
Cette manière de lire l’entrée dans l’activité de l’enfant et de la concevoir à partir de ses intérêts porte un nom : le projet d’activité.
L’activité dure le temps qu’elle dure, elle peut se répéter régulièrement ou pas, s’intercaler entre d’autres temps ou se dérouler en parallèle d’autres propositions d’activités mises en place à la demande des enfants.
Cette activité prendra une partie du temps ou tout le temps et mobilisera les enfants qui en sont porteurs.
Mais quelle importance une équipe d’animation veut bien accorder à la capacité des enfants d’agir et d’exprimer leurs envies ?
On décide ou pas de tenir compte des propositions des enfants pour définir avec eux les activités. Évidemment c’est beaucoup plus difficile de mettre en œuvre les moyens de recueillir leurs avis et de les autoriser à faire ce qu’ils veulent dans un cadre de possibles définit avec eux.
Laisser jouer les enfants s’ils veulent jouer, investir les espaces, utiliser les matériaux, et faire appel aux compétences de leurs animateurs. Pour d’autres, s’inscrire dans les propositions de leurs animateurs, par exemple, de vivre une journée à thèmes qu’ils auront librement préparé à l’avance.
Bertrand Chavaroche, Dossier des Cahiers de l’animation n°1 : Les centres de loisirs.
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